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lundi 31 octobre 2011

Tricheuse


En relisant les quelques pépites que j'avais déposées sur ces pages, après les avoir tant soignées, j'y retrouve un ton léger, aérien que j'avais dû avoir fichtrement du mal à adopter tant il ne m'est pas naturel. Il est agréable de revenir ici comme on rentre chez soi après une longue absence, et de tout reconnaître, chaque chose à sa place et tellement peu de poussière sur les jolis bibelots...

Enfin me revoilà, avec mes gros sabots, et la plume encrassée de ce que j'ose appeler mes "réflexions" appuie avec lourdeur ses mots patauds et maladroits. Vaut-il mieux ça ou rien ? Sur un coup de tête je voudrais réécrire, mais j'en suis réduite à improviser des sujets que je cueille aussitôt comme des fruits trop verts qui n'auraient pas eu le temps de mûrir...

Si je veux à nouveau collectionner mes émotions et mes pensées, il me faut réapprendre à les bien apprêter, les lisser et les perfectionner avant de les coucher sur ces pages. En attendant, et comme pour m'entraîner, je crois que je vais prendre la liberté de replanter des mots que j'avais laissés en friche dans un pré voisin. Et même m'autoriser à retoucher légèrement ce qui a déjà été gravé dans ce marbre-ci.

C'est de la triche, j'assume.

dimanche 30 octobre 2011

Vérité plurielle


Je discutais hier avec un ami de ma conception de la vérité. Je me refuse à admettre que la vérité puisse être « relative », car alors tout est vrai, et le concept même de vérité disparaît. D'un autre côté, les gens les plus convaincus de posséder la vérité sont souvent aussi de ceux qui font le plus de mal autour d'eux, et il n'y a qu'à lire l'Électre de Giraudoux pour se faire une idée de ce dont je veux parler. Mon frère aîné vous dirait que la vérité n'existe pas. Le Dieu chrétien vous dit, lui, qu'Il est la Vérité. Et selon moi, les deux points de vue se tiennent. Je m'explique.

Si la Vérité n'est pas relative, alors elle relève de l'absolu (et quoi de plus absolu que le divin ?). Mais de deux choses l'une : si on ne croit pas dans le divin, ou du moins dans la possibilité d'un absolu, alors il ne peut y avoir de vérité, qui par essence est absolue. De l'autre côté, si je crois à l'existence d'un absolu, je suis en revanche convaincue de mon incapacité totale à l'appréhender par mon esprit humain, qui en est beaucoup trop loin... Comme être humain, je suis inscrite dans le temps, dans l'espace, dans les limites de mes connaissances et de mes expériences. Sans compter le passage par les mots pour exprimer, comprendre, interpréter ce que je pourrais prendre pour des vérités. Et en tant que linguiste, je sais à quel point les mots empêchent d'accéder à l'absolu.

Et pourtant, je crois que la vérité existe, bien que je ne puisse pas y accéder totalement. Tout ce que je peux atteindre, ce sont des fragments de vérité. Mais les autres, avec leurs expériences, leurs connaissances, leur sensibilité et leurs mots à eux, peuvent atteindre d'autres fragments de vérité, parfois contradictoires avec les miens. Et qui a raison ?

Du moment que tout le monde est de bonne foi, si chacun écoute raisonnablement l'avis de l'autre et le prend en compte, mais que l'on ne peut pour autant se mettre d'accord : est-ce que l'un a raison contre l'autre ? Est-ce que les deux ont tort ? Est-ce que mon amie qui se plaît à le répéter est réellement une « girouette » lorsque le dernier qui parle a raison ?

Il arrive, dans ce genre de cas, que les deux aient raison. Non pas que tous les points de vue se valent, ou que la vérité soit relative. C'est plus simple que ça : pour autant que je puisse l'appréhender, la vérité est plurielle.